Après l’Écossais, l’Hawaien et la dernière en date le Maori ; la saga s’ouvre à la langue judéo-allemande du Yiddish sous le titre de Harry Potter un der Filosofisher Shteyn. Cette traduction a été réalisée Arun “Arele” Schaechter Viswanath – le petit-fils du linguiste Mordkhe Schaechter et dont la mère est la poètesse et autrice d’un dictionnaire de référence anglais-yiddish (Comprehensive English-Yiddish Dictionary), Gitl Schaechter-Viswanath.

Cela lui a pris plus d’un an pour le faire. Tout remonte à fin 2018, lorsqu’il propose à Neil Blair (l’agent de JK Rowling) de traduire la saga dans cette langue germanique. L’agent de JK Rowling le met alors en relation avec l’éditeur suédois Olniansky Tekst Farlag, qui détient les droits sur les traductions dans cette langue.

Une fois approuvé et comme de nombreux autres traducteurs, Viswanath s’est retrouvé face à un véritable challenge. Il s’est en effet heurté à plusieurs difficultés de ce texte à la richesse polysémique. Surtout qu’il n’a pas choisi la facilité en profitant de la proximité entre la langue source et la langue d’arrivée.

Ainsi, pour traduire Quidditch, il s’est inspiré du vieil adage yiddish Az Got vil, sheest a bezem (qui signifie “Si Dieu le veut, [même] un balai peut tirer [comme un pistolet]”) pour former par altération sheesbezem. De manière similaire, le Vif d’Or devient le Goldene Flaterl (le papillon doré, les papillons étant des motifs communs du folklore juif et yiddish).

En ce qui concerne les noms des quatre maisons de Poudlard, Viswanath a tantôt utilisé la traduction littérale tantôt la translittération : Gryffondor devient alors Goldngrif (il conserve l’idée du griffon d’origine, même si en yiddish, gryff signifie vautour”), Serdaigle (Ravenclaw) devient lui Robnkrel (le corbeau griffu) et Poufsouffle (Hufflepuff) demeure tel quel puisque pas de signification étymologique discernable.

Par ailleurs, si il a opté pour la non traduction de la plupart des noms de famille, Neville Londubat se voit affubler de Longtuchus (du mot d’argot tuchus, fesses, postérieur, derrière) et Olivier Dubois s’appelle dorénavant Olivier Holtz (pour conserver le jeu de mot et quiproquo relatif à son nom). Pour les noms allitératifs secondaires, il a fait au mieux comme avec Emeric le Mauvais qui devient Emrikh der Umerlekher (litt. Emeric le Malhonnête) et Elfric l’Insatiable qui a été traduit par Elfrikh der Eyferikher (litt. Elfric le Passionné/le Jaloux).

Toujours est-il que cela ne fut pas vain et à même été couronné de succès puisque le premier tirage, de 1000 exemplaires, s’est écoulé en deux jours seulement. Si un second tirage a été commandé, sachez qu’il est déjà en train de plancher sur le second tome titré Heri Poter un di soydeskamer, avec son épineuse traduction anagrammique de “Tom Elvis Jedusor/Je suis Voldemort !

Merci Mugglenet !

* Parmi les autres traductions dévoilées, il y a :

  • le Filet du Diable qui en anglais est connu comme étant Devil’s Snare. Il devient le TayvlPastke, soit le piège du Diable.
  • les plus petites pièces de monnaie que sont les Noises (Knuts, en anglais). Le traducteur est parti du principe qu’il s’agit d’un jeu de mot sur nut (noix noisette, en anglais) avec un k silencieux. Il l’a donc traduit par Niksl (de nisl, noix, noisette).
  • pour Privet Drive (le nom de la rue des Dursley), le traducteur a été amené à chercher un équivalent significatif pour son lectorat (dont peu savent qu’il s’agit d’une sorte de buissons souvent utilisé pour les haies). Il a donc abouti à
    Liguster Gas (l’allée aux troènes).
  • la potion Tue-loup est devenue la potion Velfisher Sam (litt. le poison du loup).